Pour comprendre la dynamique et les enjeux du marché numérique brésilien, AnaMid – l’Association nationale du marché et de l’industrie numériques – a mené une enquête au premier semestre 2025 auprès d’une centaine d’entrepreneurs, clients et prestataires de services numériques. Cette enquête visait à identifier les principales tendances, les critères de décision, les obstacles commerciaux et le niveau de maturité numérique des entreprises opérant dans cet écosystème. Les données recueillies mettent en lumière les relations commerciales au sein du secteur et les pistes d’amélioration, tout en révélant un marché en pleine professionnalisation, mais qui reste confronté à d’importants freins structurels.
Du point de vue des clients, 61,5 % citent la qualité technique comme critère principal de choix des fournisseurs, reléguant le prix au second plan, qui n'arrive qu'en quatrième position. Parmi les prestataires de services, la principale difficulté identifiée (63,6 %) est la concurrence fondée uniquement sur les prix. Pour Rodrigo Neves, président national d'AnaMid, ces données révèlent un déséquilibre sur le marché.
« La guerre des prix demeure le principal obstacle au développement du marché numérique. Il est essentiel d’informer le client et de renforcer la proposition de valeur, et non pas simplement de baisser les prix pour conclure la vente. Le client est prêt à investir davantage lorsqu’il perçoit de la valeur, des compétences et des résultats concrets », affirme-t-il.
Le marketing numérique stimule la demande et la personnalisation gagne du terrain.
Le service le plus demandé au cours des 12 derniers mois a été le marketing digital (69,2 %), suivi du développement web (53,8 %) et de la gestion des réseaux sociaux (46,2 %). Des services tels que le référencement (30,8 %), le conseil en stratégie digitale (23,1 %) et le e-commerce (15,4 %) apparaissent également de manière significative, tandis que des solutions plus spécifiques, comme la business intelligence et l'automatisation du marketing, affichent une pénétration plus faible, ce qui pourrait être lié au niveau de maturité digitale des entreprises.
En revanche, chez les prestataires de services, l'offre suit de près la demande : le marketing digital est le service phare pour 61 % d'entre eux, suivi par les réseaux sociaux (48,1 %) et le développement web (42,9 %). Près de 70 % affirment élaborer des propositions personnalisées pour chaque client, soulignant ainsi la recherche de solutions sur mesure. Cependant, seuls 9,1 % indiquent inclure systématiquement un calendrier et un descriptif détaillé dans leurs propositions, ce qui explique peut-être le principal grief des clients : le manque de transparence des processus, évoqué par 46,2 % des répondants.
Par ailleurs, les entreprises ont également signalé des difficultés à évaluer la qualité technique (46,2 %) et une offre pléthorique sur le marché (30,8 %), ce qui complexifie le processus de sélection. « Le manque de standardisation et de clarté des propositions constitue un frein majeur. Il y a un manque de méthodologie, mais aussi un manque de culture du côté des entreprises. Cette relation doit être mieux équilibrée », prévient Rodrigo.
Taux de réussite dans la conclusion des accords
L'analyse des taux de conversion révèle une situation difficile pour les prestataires de services numériques. La répartition des résultats montre que 31,2 % d'entre eux atteignent des taux de conversion compris entre 25 % et 40 %, ce qui représente le groupe le plus important. Ce pourcentage, bien que le plus fréquent, indique néanmoins que la majorité des opportunités commerciales ne se concrétisent pas en contrats.
De manière inquiétante, 23,4 % des prestataires de services affichent des taux de réussite inférieurs à 10 %, et 23,4 % supplémentaires se situent entre 10 % et 25 %. Cela signifie que 46,8 % de ces professionnels ont des taux de conversion inférieurs à 25 %, ce qui révèle des difficultés dans le processus de vente et des problèmes potentiels de positionnement, de tarification ou de qualification des prospects.
Seuls 10,4 % des prestataires de services atteignent des taux de réussite supérieurs à 40 %, ce qui démontre que peu d'entre eux parviennent à atteindre des niveaux de conversion considérés comme excellents sur le marché B2B. « Ce petit groupe possède probablement des avantages concurrentiels significatifs, des processus de vente plus efficaces ou opère dans des niches spécifiques moins concurrentielles », explique le président d'AnaMid.
Il convient de noter que 11,7 % des prestataires de services ne disposent pas de données sur leur taux de réussite, ce qui indique des lacunes possibles dans le contrôle et le suivi des indicateurs commerciaux, pouvant entraver l'optimisation des processus de vente.
Retour des propositions
Les « propositions non définitives » concernent 40,3 % des prestataires de services, révélant des problèmes de communication et de suivi dans le processus de vente. Ce problème peut être lié à la fois à la qualité des propositions et aux procédures de suivi des ventes mises en place par les prestataires.
L'analyse des types de retours reçus suite au refus de propositions révèle des tendances importantes dans la communication entre prestataires et clients. « Ils prétendent que le prix dépasse le budget » est le retour le plus fréquent, mentionné par 62,3 % des prestataires. « Ce résultat confirme la pression à la baisse sur les prix du marché et suggère que de nombreux prestataires peuvent avoir des difficultés à communiquer correctement la valeur de leurs services », explique Rodrigo.
« Je n'ai reçu aucune réponse » : ce rapport est partagé par 35,1 % des prestataires de services, ce qui témoigne d'un manque de communication et de professionnalisme important de la part de nombreux clients. « Ils disent que ce n'était pas le bon moment pour embaucher » apparaît pour 33,8 % d'entre eux, suggérant des problèmes de timing et de qualification des opportunités. Ce type de retour d'information peut révéler à la fois des difficultés financières chez les clients et des lacunes dans la qualification initiale des opportunités par les prestataires de services.
« Ils disent avoir choisi un autre fournisseur » : cette déclaration est mentionnée par 28,6 % des prestataires de services, mais 28,6 % d'entre eux indiquent que cela se produit « sans explication ». Ce manque de transparence rend difficile la compréhension des facteurs déterminants et freine l'amélioration des processus métier.
Seuls 2,6 % des prestataires de services reçoivent des commentaires constructifs comportant des points à améliorer, ce qui indique une occasion manquée de développement mutuel entre clients et prestataires de services.
Le marché est encore en développement et se heurte à des barrières structurelles.
L'auto-évaluation des prestataires révèle un marché en pleine mutation : 38,5 % des entreprises se situent à un stade intermédiaire de maturité numérique, tandis que 30,8 % se considèrent encore comme débutantes. Seules 7,7 % s'estiment à un niveau très avancé. Ces données expliquent en partie le marché encore restreint des services à forte sophistication technique et la difficulté à cerner les facteurs de différenciation proposés.
La convergence de l'offre et de la demande dans des services tels que le marketing digital, conjuguée à la demande croissante de performance et de retour sur investissement, laisse présager une maturation du marché. Cette maturation pourrait engendrer une plus grande professionnalisation, mais aussi une concurrence accrue et une pression plus forte en faveur de la différenciation. La répartition des services proposés et souscrits témoigne d'une tendance à la spécialisation, offrant des opportunités croissantes aux prestataires capables de développer une expertise dans des niches spécifiques comme la veille stratégique, la conception UX/UI ou l'intelligence artificielle.
« Les entreprises qui parviendront à gérer efficacement ce contexte, en misant sur la qualité technique, la transparence des processus et une communication claire de la valeur ajoutée, seront bien placées pour tirer parti des opportunités de croissance du marché numérique brésilien », ajoute le président national d'AnaMid.
Tendances et perspectives d'avenir
Une analyse des fermetures d'entreprises prévues pour le premier semestre 2025 révèle une situation mitigée : 36,4 % des prestataires de services qualifient cette période de « moyenne », tandis que 42,9 % émettent un avis négatif. Ce constat suggère une certaine prudence sur le marché, possiblement liée à des facteurs économiques plus généraux ou à une évolution des comportements d'achat des entreprises.
La présence de services liés à l'intelligence artificielle et aux chatbots (23,4 % des fournisseurs) témoigne d'une tendance à l'intégration des nouvelles technologies dans l'offre de services numériques. Cette évolution devrait s'accélérer, créant ainsi des opportunités pour les fournisseurs qui sauront se positionner judicieusement sur ces segments émergents.
« Le marché brésilien des services numériques montre des signes de maturité, mais reste confronté à d’importants défis liés à la communication de la valeur, à la transparence et à la professionnalisation des processus. Son succès futur dépendra de la capacité des prestataires de services et des clients à collaborer pour surmonter ces obstacles structurels », conclut Rodrigo.

