Le mois dernier, la justice de Goiânia a interdité à un résident de louer son appartement via Airbnb dans une copropriété résidentielle. Cette décision a remis sur le devant de la scène le débat sur la fonction sociale de la propriété et les limites du droit individuel face à l'intérêt collectif. Le magistrat a estimé que cette pratique constituait une activité commerciale d'hébergement, interdite par la convention de copropriété, document principal régissant la vie en copropriété, et a ordonné la suspension immédiate des locations, renforçant ainsi le rôle de cet instrument en tant que régulateur de la vie collective. Ce débat gagne en importance face à l'expansion d'Airbnb au Brésil : en 2024, la plateforme a enregistré des voyageurs dans 2 500 villes, ce qui représente près de 45 % du total des municipalités brésiliennes, selon les données de l'entreprise elle-même.
L'analyse du juge indique que la convention de copropriété joue un rôle central dans la vie communautaire, fonctionnant comme une sorte de “ constitution ” interne en établissant des règles de vie commune entre les résidents. Bien qu'elle ne puisse primer sur la loi, ce document possède une force normative pour réglementer les pratiques ayant un impact sur la collectivité, y compris les activités commerciales ou les locations qui pourraient compromettre la sécurité, la tranquillité et la salubrité. Le Code civil, dans son article 1.336, impose déjà des limites claires à l'usage de la propriété, garantissant au copropriétaire la liberté d'usage de son lot, à condition de ne pas causer de préjudice aux autres.
Selon Rafael Verdant, associé du Contentieux civil du cabinet Albuquerque Melo Advogados, la décision renforce précisément cet équilibre entre droits individuels et collectifs. “ La convention est l'outil le plus important permettant aux copropriétaires de s'autogouverner. Elle réglemente l'usage des parties communes et protège la communauté des pratiques pouvant générer de l'insécurité, des nuisances sonores excessives ou une dégradation du vivre-ensemble. C'est en ce sens que l'intérêt collectif prime souvent sur l'individuel ”, affirme-t-il.
L'expert rappelle que le droit de propriété n'est pas absolu. “ Le Code civil établit que chaque copropriétaire peut utiliser son lot librement, à condition de ne pas nuire aux autres. Autrement dit, la vie en copropriété impose une condition naturelle : en cas de conflit, l'intérêt collectif tend à prévaloir sur l'individuel ”, ajoute Verdant. Pour lui, c'est le point central de la décision de Goiânia, qui renforce la prééminence de la collectivité sur l'exploitation économique du bien immobilier dans certains contextes.
Au-delà de l'interprétation juridique, le débat implique des aspects pratiques de la vie quotidienne en copropriété. Parmi les principaux risques soulevés par les résidents concernant les locations de courte durée figurent l'entrée fréquente de personnes inconnues, la possibilité de fêtes et de nuisances sonores, l'usure accélérée des parties communes et l'effritement du sentiment communautaire. Ces facteurs aident à expliquer pourquoi, dans de nombreux cas, la collectivité cherche à imposer des limites à l'exploitation économique individuelle du bien immobilier.
Le débat dépasse les limites de chaque immeuble. Des projets de loi en cours d'examen au Congrès national, tels que le PL 2030/2025 et le PLP 78/2025, discutent de la qualification de ce type de location comme location classique ou comme hébergement, avec des propositions exigeant l'autorisation expresse des copropriétés et des règles plus proches de celles applicables aux hôtels et aux chambres d'hôtes. Pour Verdant, une réglementation équilibrée est nécessaire. “ Il ne s'agit pas d'interdire de manière indiscriminée. Il faut reconnaître que cette modalité est une réalité économique et sociale, mais elle a besoin de paramètres clairs. La solution passe par des règles internes exigeant, par exemple, un enregistrement préalable des voyageurs, une limitation de la durée ou de la fréquence des locations et des pénalités en cas de non-respect. ”
La plateforme elle-même met à disposition des ressources pour protéger les hôtes, les voyageurs et les communautés, incluant des politiques de vérification d'identité, une assurance contre les dommages et des canaux de signalement des comportements inappropriés. L'expérience internationale montre que la régulation est essentielle : en Espagne, le gouvernement a récemment intensifié les contrôles et appliqué des restrictions à la location de courte durée dans un contexte de crise du logement, illustrant comment les politiques publiques peuvent équilibrer l'usage économique des biens immobiliers avec la préservation du droit au logement et de la sécurité collective. Cette perspective renforce la nécessité de règles claires et adaptées à la réalité locale, garantissant que les copropriétés puissent protéger la collectivité sans ignorer la viabilité économique d'Airbnb.
L'avocat conclut que le grand défi est d'harmoniser les droits. “ Une réglementation efficace doit garantir le droit de propriété et d'exploitation économique du bien, mais aussi préserver l'intérêt collectif, en permettant aux copropriétés de délibérer sur les restrictions et conditions. Il n'existe pas de modèle unique : ce qui fonctionne dans un immeuble à vocation familiale peut ne pas être applicable à une copropriété à vocation plus touristique ou commerciale ”, affirme-t-il.

